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Violation de l’Etat de droit : que risque véritablement la Pologne ?

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Sommée par Bruxelles depuis plusieurs mois de revenir sur les réformes engagées menaçant l’État de droit, la Pologne, gouvernée par le parti très conservateur Droit et justice, s’expose à des sanctions inédites. Mercredi dernier, l’adoption d’un « avis » formel par la Commission européenne marque le premier pas d’une procédure exceptionnelle.

Les rencontres entre Frans Timmermans, vice-président de la Commission européenne, et Beata Szydlo, chef du gouvernement polonais, n’ont pas empêché la mise en place d’une procédure exceptionnelle à l’encontre de la Pologne pour non respect de l’Etat de droit.
Les rencontres entre Frans Timmermans, vice-président de la Commission européenne, et Beata Szydlo, chef du gouvernement polonais, n’ont pas empêché la mise en place d’une procédure exceptionnelle à l’encontre de la Pologne pour non respect de l’Etat de droit.

A la suite de la victoire du parti Droit et justice (PiS) en novembre 2015, la Pologne, par le biais de son président Andrzej Duda et de la chef du Gouvernement Beata Szydlo, a amorcé des réformes contestées au sein des médias et de l’armée notamment. Cependant, c’est la réforme du Tribunal constitutionnel qui a amené la Commission européenne, par la voix de son vice-président Frans Timmermans, à émettre un « avis » sur l’État de droit dans le pays. Plusieurs recommandations y sont faites parmi lesquelles l’annulation de la nomination de trois juges acquis au PiS au Tribunal constitutionnel, la mise en œuvre de tous les arrêts rendus par le Tribunal constitutionnel depuis le 9 mars et le retour sur la loi du 22 décembre 2015, qui modifie le fonctionnement du Tribunal.

Cet « avis » s’inscrit dans une démarche de dernier recours puisque Timmermans a multiplié les contacts et les discussions avec Varsovie (il y était encore le 24 mai dernier), espérant une évolution du gouvernement polonais. De plus, les instances européennes sont longtemps restées réticentes à l’adoption de cet « avis » de peur de se voir accusées d’ingérence, alors que se profile le référendum britannique sur l’appartenance à l’Union européenne. Cependant, l’annonce n’a pas fait flanché le gouvernement polonais qui s’est montré uni contre cette décision européenne qualifiée de « suggestion qui ne nous oblige à rien » par le ministre des Affaires étrangères, Witold Waszczykowski, ou encore  comme une volonté de « nuire à un gouvernement qui ne lui convient pas », selon Zbigniew Ziobro, le ministre de la Justice.

La menace de l’article 7 du Traité de Lisbonne

Désormais, la Pologne est invitée à envoyer ses « observations » en réponse à l’« avis ». Ceci constitue la première étape de la « procédure pré-article 7 », créée par l’ancien président de la Commission, José Manuel Barroso. Dans un deuxième temps, si le problème n’a pas trouvé de solution, la procédure prévoit l’envoi par la Commission d’une «recommandation État de droit», publique cette fois-ci, avec une exigence de résolution des problèmes définis dans un délai imparti. Dans un troisième et dernier temps, la Commission devra contrôler le suivi donné à sa recommandation par l’État membre. Faute de suivi positif, la Commission peut recourir à l’un des mécanismes prévus à l’article 7 du traité de Lisbonne. Cet article, encore jamais activé contre un État membre, prévoit, en cas d’atteintes graves à la dignité humaine, à la liberté, à la démocratie, à l’égalité, à l’État de droit ou aux droits de l’Homme, une suspension des droits en tant que pays membre de l’UE et notamment la perte du droit de vote au Conseil européen.

Si les sanctions encourues par la Pologne sont exceptionnelles, l’arsenal législatif et judiciaire de l’Union européenne pourrait se retourner contre elle. En effet, dans un tout récent entretien, le président de Droit et justice, Jaroslaw Kaczynski, a qualifié les agissements de Bruxelles « d’attentat contre la souveraineté » polonaise et a menacé de porter la procédure de la Commission européenne devant la Cour de justice de l’UE. Alors que la montée des euroscepticismes se fait de plus en plus présente, l’affrontement entre la Pologne et Bruxelles ne semble pas prêt de trouver une issue rapidement.

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Marc GERARD

Ancien élève de CPGE B/L au Lycée Montaigne, Marc Gérard est diplômé d'un master en Histoire des mondes modernes et contemporains, certifié et enseignant en Histoire-Géographie. Il est rédacteur pour Les Yeux du Monde depuis janvier 2016.

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